À trois jours de la fin de la saison régulière, les débats autour des trophées individuels gagnent logiquement du terrain dans la sphère médiatique NBA. Et alors que celui autour du titre de « Most Valuable Player (MVP) » fait évidemment beaucoup plus parler que les autres, celui autour du titre de « Defensive Player of the Year (DPOY) » fait également causer dans la ligue.
Il faut dire qu’il s’agit probablement du scrutin le plus indécis de tous, avec plusieurs candidats qui se dégagent assez clairement, sans qu’un favori naturel et légitime ne ressorte tant que ça du lot.
Marcus Smart, Bam Adebayo, Mikal Bridges, Jaren Jackson Jr, Giannis Antetokounmpo, Draymond Green, Joel Embiid, Matisse Thybulle… Les prétendants ne manquent ainsi pas et ils présentent tous de sérieux arguments.
La crème des défenseurs
À moins que ce ne soit encore Rudy Gobert qui rafle la mise, lui qui est toujours en lice pour glaner une quatrième récompense record, à égalité avec Dikembe Mutombo et Ben Wallace. Et le pivot du Jazz a une idée déjà bien précise du critère qui devrait être observé par les votants, selon lui…
« Il y a beaucoup de grands défenseurs dans cette ligue, c’est super que beaucoup de joueurs veuillent remporter ce titre, mais je pense que tout est question d’influence », livre-t-il. « Ce que je veux dire, c’est qui a le plus d’influence sur son équipe ? Au fil des années, j’ai fait en sorte d’avoir une influence positive sur le jeu de mon équipe, en défense. Que ça résulte sur des victoires. Cette année encore, nous sommes là. Nous ne sommes pas aussi bons que la saison dernière collectivement, mais nous sommes toujours une bonne équipe défensive. Et quand on s’attarde sur les chiffres, ils ne mentent pas, ils parlent d’eux-mêmes… »
Difficile de donner tort à Rudy Gobert sur ce point-là, car il se classe cette saison…
— N°1 à la moyenne de rebonds défensifs (11.1),
— N°1 au « defensive rebound percentage » (31.3%),
— N°2 à la moyenne de tirs contestés (13.1),
— N°2 au « block percentage » (67.3%),
— N°2 au « percentage points differential » (-6.5%),
— N°3 à la moyenne de contres (2.1),
— N°3 au « defensive win shares » (4.1),
— N°6 à la moyenne de « box outs » défensifs (2.1),
— N°11 au « defended field goal percentage » (42.1%),
— N°14 au « defensive box plus/minus » (1.7),
— N°16 au « defensive rating » individuel (105.1).
Autant dire que ces seules statistiques suffisent à faire du Français l’un des favoris au titre de Défenseur de l’année 2022, si ce n’est le grandissime favori. D’autant que, pour couronner le tout, le Jazz encaisse en moyenne (et sur 100 possessions) pas moins de 7 points de plus sans lui (112.3) qu’avec lui (105.1) sur le parquet.
Début de lassitude chez les votants ?
Pour autant, même s’il est toujours autant influent défensivement, Rudy Gobert ne risque-t-il pas de payer le fait d’avoir déjà remporté trois fois cette distinction individuelle en 2018, 2019 et 2021 ?
« Évidemment », répond-il sans détour. « C’est humain : quand quelqu’un fait la même chose année après année, sans perdre en régularité, on prend ça pour acquis. Je savais que ça finirait par arriver, mais j’ai vraiment senti cette saison que les gens se disaient : ‘Ok, Rudy [Gobert] fait ça, mais allons plutôt voir ce que font les autres. Arrêtons de regarder les chiffres, arrêtons de regarder l’influence sur le jeu et allons chercher des histoires plus excitantes ailleurs’. Je ne peux pas leur en vouloir, même si c’est un peu injuste, car c’est juste humain. »
Rudy Gobert demande donc aux votants de ne pas oublier son impact, tangible, au moment de faire leur choix.
« Je ne suis pas le plus amusant à regarder jouer, c’est évident, mais je le répète : les statistiques ne mentent pas », ajoute-t-il. « Tout ce qui compte, c’est ce que vous accomplissez chaque soir pour votre équipe. Les highlights et les histoires peuvent être mis en avant et pris en compte, mais les chiffres parlent d’eux-mêmes à l’arrivée. Si quelqu’un faisait ce que je fais et avait mon influence sur le jeu, mais qu’il ne s’appelait pas Rudy Gobert, il serait le favori au titre de Défenseur de l’année, sans l’ombre d’un doute. Donc pourquoi devrais-je être pénalisé d’être aussi régulier saison après saison ? »
Avis tranché sur le MVP
Pour finir, Rudy Gobert a également été invité à donner son avis sur le scrutin du MVP 2022, dans lequel il pourrait d’ailleurs récolter quelques voix.
Et là encore, en tenant compte de ses propres critères, similaires à ceux énoncés pour le DPOY, le Français opterait pour un pivot. De surcroît européen et présent à l’Ouest, dans la même division que le Jazz…
« Plusieurs joueurs font des choses incroyables cette saison, mais trois noms me viennent directement à l’esprit : Nikola Jokic, Joel [Embiid] et Giannis [Antetokounmpo] », concède-t-il. « Mais encore une fois, quand vous vous attardez sur l’influence sur le jeu et que vous pensez au nom du trophée, qui est ‘Most Valuable Player’, je voterais pour Jokic si j’en avais la possibilité. Je pense qu’il est le plus influent de tous pour son équipe. »
Defensive rebound percentage (DRB%) : une estimation du pourcentage de rebonds défensifs dits « disponibles » récupérés par un joueur dans un match. En clair, plus le DRB% est élevé, moins un joueur accorde de rebonds offensifs à ses adversaires.
Block percentage (BLK%) : une estimation du pourcentage de tirs contrés par un joueur (uniquement sur les contres réalisés) quand il est sur le parquet. En clair, plus de BLK% est élevé, plus un joueur est l’auteur des contres dans un match.
Percentage points differential (DIFF%) : la différence entre le pourcentage aux tirs habituel d’un joueur et son pourcentage aux tirs quand il est défendu par tel ou tel défenseur. En clair, plus le DIFF% est négatif, plus un joueur baisse le pourcentage aux tirs de ses adversaires.
Defensive win shares (DWS) : une estimation du nombre de victoires auxquelles un joueur a contribué grâce à son impact défensif.
Box out : Ecran retard en français. Un « box out », qu’il soit offensif ou défensif, consiste à se mettre en opposition pour empêcher un adversaire de capter un rebond.
Defended field goal percentage (DFG%) : le pourcentage aux tirs auquel un joueur limite un attaquant quand il est dans la position du défenseur le plus proche. En clair, plus le DFG% est faible, plus un joueur rend les attaquants maladroits quand il est autour d’eux.
Plus/minus défensif (ou defensive box plus/minus) : une estimation du nombre de points (sur 100 possessions) auxquels un joueur a contribué, par sa défense, quand il est sur le parquet.
Defensive rating (DRTG) : une estimation du nombre de points encaissés par un joueur, ou une équipe, sur 100 possessions.
Rudy Gobert | Pourcentage | Rebonds | |||||||||||||
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Saison | Equipe | MJ | Min | Tirs | 3pts | LF | Off | Def | Tot | Pd | Fte | Int | Bp | Ct | Pts |
2013-14 | UTH | 45 | 10 | 48.6 | 0.0 | 49.2 | 1.1 | 2.3 | 3.4 | 0.2 | 1.3 | 0.2 | 0.7 | 0.9 | 2.3 |
2014-15 | UTH | 82 | 26 | 60.4 | 0.0 | 62.3 | 3.2 | 6.2 | 9.5 | 1.3 | 2.1 | 0.8 | 1.4 | 2.3 | 8.4 |
2015-16 | UTH | 61 | 32 | 55.9 | 0.0 | 56.9 | 3.4 | 7.5 | 11.0 | 1.5 | 2.7 | 0.7 | 1.9 | 2.2 | 9.1 |
2016-17 | UTH | 81 | 34 | 66.1 | 0.0 | 65.3 | 3.9 | 8.9 | 12.8 | 1.2 | 3.0 | 0.6 | 1.8 | 2.6 | 14.0 |
2017-18 | UTH | 56 | 32 | 62.2 | 0.0 | 68.2 | 3.0 | 7.8 | 10.7 | 1.4 | 2.7 | 0.8 | 1.9 | 2.3 | 13.5 |
2018-19 | UTH | 81 | 32 | 66.9 | 0.0 | 63.6 | 3.8 | 9.0 | 12.9 | 2.0 | 2.9 | 0.8 | 1.6 | 2.3 | 15.9 |
2019-20 | UTH | 68 | 34 | 69.3 | 0.0 | 63.0 | 3.4 | 10.1 | 13.5 | 1.5 | 3.2 | 0.8 | 1.9 | 2.0 | 15.1 |
2020-21 | UTH | 71 | 31 | 67.5 | 0.0 | 62.3 | 3.4 | 10.1 | 13.5 | 1.3 | 2.3 | 0.6 | 1.7 | 2.7 | 14.3 |
2021-22 | UTH | 63 | 32 | 70.8 | 0.0 | 69.2 | 3.7 | 11.1 | 14.8 | 1.1 | 2.7 | 0.7 | 1.8 | 2.1 | 15.4 |
Total | 608 | 30 | 65.2 | 0.0 | 63.8 | 3.3 | 8.3 | 11.7 | 1.3 | 2.6 | 0.7 | 1.7 | 2.2 | 12.4 |